Passer au contenu principal

Conférence de presse annuelle du juge en chef du Canada


Mot d’ouverture du très honorable Richard Wagner, C.P.
Juge en chef du Canada

Bonjour à tous et à toutes, et merci de vous joindre à moi à l’occasion de ma deuxième conférence de presse en tant que juge en chef du Canada.

L’an dernier, lorsque je me suis adressé à vous, je n’étais juge en chef que depuis six mois. C’est donc pour la première fois, aujourd’hui, que je vais vous faire rapport sur les travaux et activités d’une année complète à ce titre. Et ce fut une année chargée, croyez-moi.

Il y a beaucoup à dire depuis la conférence de presse de l’année dernière. La Cour suprême du Canada a poursuivi la mise en place de nouveaux moyens de communiquer avec les Canadiennes et les Canadiens afin de les aider à comprendre le travail qu’elle accomplit. Nous avons lancé la première édition de la Rétrospective annuelle, une publication qui était en cours de préparation l’an dernier, comme je vous l’avais mentionné. Cette publication peut être consultée dans les deux langues officielles sur notre site Web, et téléchargée à partir de celui-ci. Rédigée dans un langage clair, et agrémentée de photos et de tableaux, elle explique les travaux et activités de la Cour.

Nous avons poursuivi la publication des Causes en bref, lesquelles expliquent en langage simple les décisions de la Cour. Jusqu’ici, nous en avons publié 54 et nous avons rejoint près d’un million de gens en les affichant sur Facebook et sur Twitter. Elles ont été consultées plus de 300,000 fois sur notre site Web. Chaque édition de La cause en bref vise à aider la population canadienne à comprendre un peu mieux un domaine du droit.

Nous projetons de visiter Winnipeg cet automne, comme je l’ai annoncé lors de la conférence de presse précédente. À l’occasion de cette visite, nous allons également y entendre deux appels, afin de donner aux gens d’une autre région du pays l’occasion de voir leur Cour en action. Ce sera la première fois de toute son histoire que la Cour siégera à l’extérieur d’Ottawa, et nous sommes toutes et tous impatients d’aller à la rencontre de la population du Manitoba lorsque nous y serons.

Mes collègues et moi-même continuons de visiter différentes régions du pays pour prendre la parole devant des Canadiennes et des Canadiens, et par la même occasion les écouter. Au cours de la dernière année, j’ai prononcé plus d’une trentaine d’allocutions à l’occasion d’événements variés — par exemple, des cérémonies d’assermentation de juges, une conférence sur les services pro bono et un concours de plaidoirie. Je me suis également rendu à l’étranger, où j’ai pris la parole tant auprès de juges que de juristes d’ailleurs afin de maintenir notre appui à la primauté du droit dans le monde. La solidité de notre système de justice et le respect dont jouit la primauté du droit au Canada sont pour moi de grandes sources de fierté, et je suis évidemment fier d’avoir la possibilité de partager avec des représentants d’autres pays tout ce que nous avons appris à cet égard.

Sur le plan des opérations, nous avons modifié les règles de procédure de la Cour afin de faciliter le dépôt électronique de documents, et de rendre facultatif le recours à des correspondants sur place à Ottawa.

En tant que juge en chef du Canada, je suis appelé à jouer divers rôles en marge de la Cour. Je préside le Conseil canadien de la magistrature, et nous nous sommes penchés sur le mandat du Conseil et nous avons déjà instauré des mesures afin d’améliorer sa gouvernance. L’Institut national de la magistrature, une autre organisation que je préside, poursuit sa mission de formation par et pour les juges, tant au Canada qu’à l’étranger.

Je suis très fier de la magistrature canadienne. Elle représente une composante fondamentale de notre démocratie. Chaque jour, nos juges ne ménagent pas leurs efforts pour assurer à l’ensemble des Canadiennes et des Canadiens un application claire et équitable du droit et des lois qui les régissent.

Tous ces efforts sont déployés dans le but d’accroître et de maintenir la confiance du public envers nos tribunaux et notre système de justice.

Depuis ma nomination, j’ai beaucoup parlé d’accès à la justice. Tout le monde en parle. C’est un sujet, une expression à la mode ces temps-ci. Par contre, je trouve que le mot « accès » est quelque peu réducteur. En effet, il semble évoquer l’idée qu’il suffirait d’installer une plus grande porte afin que plus de gens puissent entrer. Le mot semble également laisser entendre que si les gens n’empruntent pas la porte existante, pourtant déjà grande, c’est peut-être qu’ils ne veulent tout simplement pas nous rendre visite.

Mais il existe peut-être d’autres raisons susceptibles d’expliquer pourquoi nos voisins ne passent pas nous voir. Peut-être que notre entrée est sombre et envahie, et que cela les rend nerveux et hésitants à s’approcher. Peut-être que c’est parce que nous ne sortons jamais et que nos rideaux sont toujours fermés. Peut-être qu’une fois entrés, les gens trouvent les pièces petites et étouffantes, ou encore considèrent nos habitudes étranges et formalistes.

Bien que nous soyons nombreux à parler abondamment d’« accès », je crains que cela ne soit que des paroles. Les paroles ne suffisent pas, ne suffisent plus. Nous avons plutôt besoin d’action. Toujours dans l’esprit de la métaphore de la « petite maison », peut-être faudrait-il la doter d’un jardin, y ajouter un peu de couleur. Peut-être devrait-on envisager un aménagement plus ouvert, pour que nos invités se sentent plus à l’aise quand ils nous rendent visite. Peut-être que, dans les faits, nous devrions « prendre place sur le perron », et en quelque sorte aller ainsi au-devant des gens et les inviter à entrer. Peut-être aussi que les gens du voisinage devraient se rassembler de temps à autre pour échanger et s’entraider.

Voilà pourquoi, ces temps-ci, au lieu de penser en termes d’« accès à la justice », je pense davantage en termes d’« actions concrètes en faveur de la justice ». Par cela, je pense aux mesures tangibles que nous prenons — et que nous pourrions prendre dans le futur — pour concrétiser la justice. L’accès — le véritable accès — est tributaire de la prise de telles actions, ainsi que des fonds nécessaires pour réaliser ces actions. Et ce, pour faire en sorte que les Canadiennes et les Canadiens obtiennent, en matière de justice, les services dont ils ont besoin, au moment même où ils en ont besoin. Aussi pour leur tranquillité à l’esprit, pour qu’ils sachent que ces services existent, qu’ils sont à leur disposition même quand ils n’en ont pas encore besoin. Pour que les gens sachent que l’édifice de la justice est bien entretenu et qu’il ne risque pas de s’effondrer. Pour que les gens sachent que nos portes sont toujours ouvertes, et qu’ils sont les bienvenus.

Les actions auxquelles je songe n’ont pas besoin d’être des mesures de grande envergure. Notre maison possède des murs et des fondations solides. En conséquence, tant et aussi longtemps que nous veillerons à l’entretenir régulièrement chaque année, nous n’aurons pas à la rebâtir du tout au tout. Cependant, nous qui sommes des acteurs — et j’emploie le mot acteurs à dessein — devons apporter notre contribution et faire tout ce qui est en notre pouvoir pour améliorer les processus, renseigner davantage et renseigner mieux, et veiller à ce que tous et chacun obtiennent l’aide juridique qu’ils méritent.

Et maintenant, je serai ravi de répondre à vos questions.

Allocution prononcée par le très honorable Richard Wagner, C.P.
Juge en chef du Canada
À l’occasion de la conférence de presse annuelle du juge en chef du Canada
Ottawa (Ontario)
Le 20 juin 2019

Date de modification : 2024-12-20