La Cause en bref
Les Causes en bref sont des courts résumés en langage simple des décisions rendues par écrit par la Cour. Ils sont préparés par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada. Ils ne font pas partie des motifs de jugement de la Cour et ils ne doivent pas être utilisés lors d’une procédure judiciaire.
Fleming c. Ontario
Informations supplémentaires
- Voir le texte intégral de la décision
- Date : 4 octobre 2019
- Citation neutre : 2019 CSC 45
- Décompte de la décision :
- En appel de la Cour d’appel de l’Ontario
- Renseignement sur le dossier (38087)
- Diffusion Web de l'audience (38087)
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Décisions des tribunaux inférieurs :
- Jugement (Cour supérieure de justice de l’Ontario) (non publié)
- Appel (Cour d’appel de l’Ontario) (en anglais seulement)
Sommaire de la Cause
La Cour suprême a jugé que les policiers ne peuvent pas arrêter quelqu’un qui n’enfreint pas la loi pour empêcher d’autres personnes de violer la paix.
M. Fleming était en route pour participer à une manifestation à Caledonia, en Ontario, en 2009. La manifestation s’opposait à l’occupation de terres par un groupe des Premières Nations. Il transportait un drapeau canadien sur un bâton et marchait le long d’une rue en bordure des terres occupées.
Des policiers en voiture l’ont vu en passant. L’occupation avait déjà causé des actes de violence et les policiers prévoyaient maintenir les groupes à distance l’un de l’autre. Les agents ont fait demi-tour et ont accéléré vers M. Fleming, qui a quitté la route et enjambé une clôture basse. Il dit avoir fait cela pour s’éloigner des véhicules qui allaient trop vite et pour se trouver sur un terrain plat. Les agents criaient. M. Fleming dit qu’il ne pensait pas qu’ils s’adressaient à lui parce qu’il n’avait rien fait de mal.
Les gens qui occupaient les terres se sont approchés de lui. Lorsqu’ils étaient à environ dix ou vingt pieds de lui, les policiers ont dit à M. Fleming qu’il était en état d’arrestation. Ils lui ont ordonné de déposer son drapeau. Il a refusé. Les agents l’ont forcé à s’allonger sur le sol, ont pris son drapeau et lui ont passé les menottes. M. Fleming dit qu’ils l’ont blessé au bras. Les policiers l’ont amené en prison et l’ont relâché quelques heures plus tard. Il a été accusé d’entrave au travail d’un policier (soit de l’avoir empêché de faire son travail). Il s’est rendu en cour une douzaine de fois pour se défendre contre cette accusation, qui a finalement été retirée.
En 2011, M. Fleming a poursuivi la Province de l’Ontario et les policiers impliqués dans son arrestation. Il a affirmé que ceux-ci avaient agi illégalement et qu’ils l’avaient agressé physiquement, arrêté illégalement et détenu arbitrairement. Il a également soutenu qu’ils avaient violé plusieurs de ses droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés, qui fait partie de la Constitution du Canada.
Les policiers tirent leurs pouvoirs des lois (comme le Code criminel) et de la common law (la loi qui découle des décisions des juges).Ils peuvent seulement agir selon ces lois. Selon la common law, les policiers peuvent restreindre la liberté d’un individu (en l’arrêtant, par exemple), si cela est raisonnablement nécessaire pour qu’ils accomplissent leurs devoirs. Les policiers ont soutenu qu’ils avaient le pouvoir en common law d’arrêter M. Fleming. Selon eux, cela était nécessaire pour prévenir une « violation de la paix », qui est plus qu’une simple perturbation. Elle ne survient que s’il y a un risque de violence et de blessure.
La juge du procès a dit que les policiers n’avaient pas le pouvoir d’arrêter M. Fleming. Elle a décidé qu’il devrait recevoir une compensation, puisque les agents avaient enfreint ses droits. Les juges majoritaires de la Cour d’appel n’étaient pas d’accord. Selon eux, les policiers avaient le pouvoir d’arrêter M. Fleming, et son arrestation était nécessaire parce que les agents croyaient qu’il y aurait une violation de la paix. Les juges ont toutefois conclu qu’il devrait y avoir un nouveau procès pour déterminer si les agents avaient utilisé une force excessive.
La Cour suprême a unanimement déclaré que les policiers n’avaient pas le pouvoir d’arrêter M. Fleming. Ils ne peuvent arrêter une personne qui respecte la loi uniquement parce qu’ils croient que cela en empêchera d’autres de violer la paix. Ils ont déjà, en vertu du Code criminel, d’autres pouvoirs pour s’occuper de ces situations. Étant donné qu’ils disposaient de ces options moins drastiques, l’arrestation de M. Fleming n’était pas vraiment nécessaire.
La Cour a noté que maintenir la paix, prévenir les crimes et protéger la vie des personnes et les biens sont les devoirs principaux des policiers en common law. Ils ont le pouvoir d’agir pour remplir ces devoirs, même si leurs actions ne sont pas spécifiquement énoncées dans le Code criminel. Prévenir les violations de la paix est clairement lié au maintien de la paix, à la prévention des crimes et à la protection de la vie des personnes et des biens. Mais la Cour a déclaré qu’il n’est pas raisonnablement nécessaire d’arrêter quelqu’un pour prévenir une violation de la paix si cette personne n’a pas commis (et n’est pas sur le point de commettre) un acte répréhensible.
Les policiers ont le droit d’utiliser autant de force que raisonnablement nécessaire pour accomplir leurs devoirs. Mais, dans la présente affaire, ils n’avaient pas le droit d’arrêter M. Fleming, donc aucun degré de force n’était justifié.
Enlever à quelqu’un sa liberté, même temporairement, est une chose sérieuse. Souvent, dans des situations comme celle de M. Fleming, la personne n’aurait aucun recours en justice contre son arrestation, parce qu’aucune accusation ne serait déposée. La seule option serait une poursuite civile coûteuse. Cela est une autre raison qui a motivé la Cour à déclarer que les règles doivent être strictes.