La Cause en bref
Les Causes en bref sont des courts résumés en langage simple des décisions rendues par écrit par la Cour. Ils sont préparés par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada. Ils ne font pas partie des motifs de jugement de la Cour et ils ne doivent pas être utilisés lors d’une procédure judiciaire.
9354-9186 Québec inc. c. Callidus Capital Corp.
Informations supplémentaires
- Voir le texte intégral de la décision
- Jugement rendu : 23 janvier 2020
- Motifs écrits publiés : 8 mai 2020
- Citation neutre : 2020 CSC 10
- Décompte de la décision :
- En appel de la Cour d’appel du Québec
- Renseignement sur le dossier (38594)
- Diffusion Web de l'audience (38594)
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Décisions des tribunaux inférieurs :
- Ordonnance (juge surveillant de la Cour supérieure du Québec) (en anglais seulement)
- Appel (Cour d’appel du Québec) (en anglais seulement)
Sommaire de la Cause
Les juges peuvent empêcher des créanciers de voter sur la marche à suivre pour régler les dettes de compagnies insolvables et approuver un « financement temporaire » fourni par des tiers pour financer des poursuites en justice, juge la Cour suprême.
Une compagnie qui n’a pas d’argent pour rembourser ses dettes est « insolvable ». La compagnie insolvable qui doit à des gens (créanciers) plus de 5 millions de dollars peut obtenir de l’aide par le biais de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC). Selon la LACC, la compagnie insolvable peut conclure des ententes avec ses créanciers pour les rembourser. Un « juge surveillant » supervise ce processus.
9354-9186 Québec inc., aussi appelée Bluberi, était insolvable. Elle devait beaucoup d’argent à Callidus parce que cette dernière lui avait consenti un prêt « garanti », ce qui veut dire que, si Bluberi ne payait pas, Callidus pourrait saisir des objets appartenant à Bluberi. (Un prêt hypothécaire est une sorte de prêt garanti.) Cela faisait de Callidus un « créancier garanti ». Bluberi avait également des « créanciers non garantis » (comme ses employés).
Bluberi a accepté de vendre ce qui lui appartenait à Callidus pour rembourser sa dette. D’après l’accord, Callidus obtiendrait les actifs de Bluberi (c’est-à-dire toutes les choses ayant une valeur monétaire qui appartiennent à Bluberi), et Bluberi ne devrait que 3 millions de dollars à Callidus. L’accord permettait aussi à Bluberi de conserver le droit de poursuivre Callidus. Bluberi voulait la poursuivre car elle la tenait responsable de ses problèmes d’insolvabilité. Ce droit de poursuite était la seule chose de valeur qui restait à Bluberi.
Bluberi avait encore d’autres dettes. Elle voulait utiliser l’argent provenant de la poursuite contre Callidus pour les payer. Or, Callidus voulait régler autrement les dettes de Bluberi. Elle a présenté un « plan d’arrangement ». Un plan d’arrangement est une proposition de marche à suivre pour payer les créanciers d’une compagnie insolvable. Un plan d’arrangement doit être approuvé par les créanciers de la compagnie. Selon le plan de Callidus, certains des créanciers de Bluberi recevraient tout ce qu’on leur doit, mais d’autres n’en recevraient qu’une partie. En échange, Bluberi serait tenue de renoncer à son droit de poursuivre Callidus. Les créanciers non garantis de Bluberi ont voté et rejeté le plan. Callidus aurait pu essayer de voter, mais elle a choisi de s’en abstenir.
Bluberi a ensuite trouvé un moyen d’obtenir l’argent nécessaire pour poursuivre Callidus : un « accord de financement de litige par un tiers ». Une compagnie fournirait l’argent en échange d’une partie de tout ce que gagnerait Bluberi dans une action en justice contre Callidus. Bluberi a demandé au juge surveillant d’approuver cet accord à titre de « financement temporaire ». Le financement temporaire est une somme d’argent qui aide une compagnie à utiliser les actifs qui lui restent. Mais Callidus a affirmé que l’accord était un plan d’arrangement sur lequel les créanciers devaient voter.
Au même moment, Callidus a présenté un nouveau plan, qui était essentiellement identique au premier. Callidus a demandé au juge surveillant l’autorisation de voter sur le nouveau plan. Si elle pouvait voter, son plan serait approuvé.
Le juge surveillant a dit que Callidus ne pouvait pas voter. Selon lui, elle agissait dans un « but illégitime ». Il a ajouté que Callidus avait choisi de ne pas essayer de voter la première fois et tentait maintenant de contourner le résultat de ce vote. Il a décidé que Bluberi pouvait aller de l’avant avec son accord de financement d’un litige sans un vote parce que l’accord était juste et ne constituait pas un plan d’arrangement.
La Cour d’appel s’est dite en désaccord avec le juge surveillant.
La Cour suprême dit à l’unanimité qu’il y a lieu de maintenir les décisions du juge surveillant. Selon elle, les cours d’appel doivent faire preuve d’un grand respect envers les décisions d’un juge surveillant, même si elles auraient pris des décisions différentes. Le juge surveillant supervise le dossier du début à la fin, connaît le mieux la situation en cause et est le mieux placé pour concilier les nombreux objectifs de la LACC. L’un de ces objectifs est d’aider les compagnies à poursuivre leurs activités. Un autre est de veiller à ce que les créanciers récupèrent le plus d’argent possible qu’on leur doit.
Dans la présente affaire, la Cour suprême dit que le juge surveillant a bien concilié ces objectifs. D’après elle, il pouvait empêcher Callidus de voter si celle-ci agissait dans un but illégitime, ce qu’elle faisait. Il pouvait également approuver l’accord de financement de litige conclu par Bluberi à titre de financement temporaire s’il le jugeait indiqué. Le juge avait raison de croire qu’il l’était. La raison d’être de l’accord était d’aider Bluberi à utiliser le seul actif qui lui restait (son droit de poursuivre Callidus).
Cette cause a été décidée « séance tenante » juste après l’audience tenue le 23 janvier 2020. Quand une cause est décidée séance tenante, cela signifie que les juges informent les parties de l’issue sur-le-champ. Dans ce dossier, les juges ont fourni par la suite des motifs écrits pour expliquer leur décision.