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La Cause en bref

Les Causes en bref sont des courts résumés en langage simple des décisions rendues par écrit par la Cour. Ils sont préparés par le personnel des communications de la Cour suprême du Canada. Ils ne font pas partie des motifs de jugement de la Cour et ils ne doivent pas être utilisés lors d’une procédure judiciaire.


Édifice de la Cour suprême du Canada

Société Radio-Canada c. Manitoba

Informations supplémentaires

Sommaire de la Cause

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La Cour suprême confirme une interdiction de publication visant une affaire dans laquelle une déclaration de culpabilité pour meurtre a été annulée.

Cet appel portait sur la question de savoir si une interdiction de publication prononcée dans une affaire criminelle terminée devait être levée afin de permettre aux médias de relater de l’information concernant l’affidavit d’un témoin. Il s’agissait de la deuxième fois que la Cour suprême du Canada entendait cet appel.

Monsieur Frank Ostrowski a été déclaré coupable de meurtre au premier degré en 1987 et condamné à l’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. En 2014, le ministre fédéral de la Justice a demandé à la Cour d’appel du Manitoba de décider si une erreur judiciaire avait été commise au procès de M. Ostrowski en 1987. En 2018, la Cour d’appel a conclu qu’il y avait effectivement eu une erreur judiciaire et elle a annulé la déclaration de culpabilité.

Au cours des procédures pour condamnation injustifiée devant la Cour d’appel du Manitoba, M. Ostrowski a voulu produire en preuve un affidavit (une déclaration sous serment) concernant la mort d’un témoin ayant participé à ces procédures. La Cour d’appel a prononcé une interdiction de publication visant cet affidavit. Dans sa décision de 2018 annulant la déclaration de culpabilité de M. Ostrowski, la Cour d’appel a refusé d’admettre l’affidavit en preuve, mais elle a ordonné le maintien de l’interdiction de publication visant son contenu.

En mai 2019, la Société Radio-Canada (« SRC ») a présenté à la Cour d’appel une requête demandant la levée de l’interdiction de publication. La Cour d’appel a refusé cette demande, concluant qu’elle n’avait plus compétence pour réexaminer l’interdiction de publication, puisqu’elle avait déjà rendu sa décision dans l’affaire de M. Ostrowski.

La SRC a interjeté appel à la Cour suprême du Canada à l’encontre des deux décisions rendues par la Cour d’appel : celle de 2018 ordonnant l’interdiction de publication, et celle de 2019 refusant de réexaminer l’interdiction de publication.

En 2021, la Cour suprême a jugé que la Cour d’appel avait effectivement le pouvoir de réexaminer l’interdiction de publication, et elle lui a renvoyé pour décision la requête de la SRC demandant la levée de l’interdiction. De plus, la Cour suprême a alors ajourné l’appel de la SRC visant l’interdiction de publication elle-même.  

Dans un arrêt unanime, la Cour d’appel du Manitoba a rejeté la requête sollicitant la levée de l’interdiction de publication qui lui avait été renvoyée pour décision. La Cour suprême se penche maintenant sur l’appel qu’elle a ajourné en 2021 concernant la décision de 2018.

En règle générale, les procédures judiciaires se déroulent publiquement. C’est ce qu’on appelle le principe de la publicité des débats judiciaires, lequel est protégé par le droit à la liberté d’expression garanti par la Charte canadienne des droits et libertés. À la lumière de la jurisprudence récente de la Cour suprême du Canada sur ce point, la SRC a demandé à la Cour de décider si la publication de renseignements visés par l’interdiction de publication constitue un risque à ce point sérieux pour la dignité des personnes concernées qu’elle justifie une exception au principe de la publicité des débats judiciaires.

La Cour suprême a rejeté l’appel. Le jugement a été rendu oralement par le juge en chef Wagner à la fin de l’audience et précisait que des motifs écrits suivraient. 

La Cour d’appel n’a pas commis d’erreur lors du prononcé de l’interdiction de publication ou de l’ordonnance intimant son maintien en vigueur. 

La Cour a rendu un jugement unanime. Elle a dit qu’il existe un solide intérêt public commandant de protéger la vie privée de la conjointe du témoin décédé et que la divulgation du contenu de l’affidavit révélerait des renseignements hautement sensibles et éminemment personnels faisant intervenir directement l’intérêt de la conjointe au titre de la dignité. De plus, l’interdiction de publication est nécessaire afin d’éviter un risque sérieux pour la dignité de la conjointe du témoin, elle n’avait pas une portée excessive ou un caractère vague, et il n’existait aucune solution de rechange raisonnable à ses modalités. Enfin, la Cour a jugé que les avantages de l’interdiction de publication l’emportent largement sur ses effets néfastes minimes sur le droit à la liberté d’expression et, par extension, sur le principe de la publicité des débats judiciaires. L’affidavit n’a joué aucun rôle dans la décision concluant qu’il y avait eu condamnation injustifiée. Pour ces raisons, la Cour a confirmé l’interdiction de publication.

Date de modification : 2023-11-09