Le plus haut tribunal du Canada
En tant que cour d’appel de dernière instance au Canada, la Cour suprême a compétence pour entendre des litiges touchant à tous les domaines du droit.
Les Canadiens et les Canadiennes peuvent avoir confiance dans l’impartialité et l’indépendance de la Cour suprême du Canada. Celle-ci est la gardienne de la Constitution et de la Charte des droits et libertés. Ses juges sont choisis selon un processus transparent, au terme duquel un comité consultatif non partisan recommande au premier ministre des candidats et candidates éminemment qualifiés. Ensemble, les neuf juges de la Cour fournissent des indications et avis sur les lois et autres règles de droit du Canada, et veillent à ce que toutes et tous aient droit à la même protection et au même bénéfice de la loi.
En tant que cour d’appel de dernière instance au Canada, la Cour suprême a compétence pour entendre des litiges touchant à tous les domaines du droit. Les juges décident un grand nombre de questions importantes — allant de problèmes touchant les pensions alimentaires pour enfants ou les restructurations d’entreprise, à des différends portant sur des droits issus de traités ou des droits constitutionnels. La Cour entend et décide des appels en français et en anglais. Elle est également une institution bijuridique, c’est-à-dire qu’elle applique le droit des deux traditions juridiques distinctes du Canada – soit le droit civil québécois et la common law. Les appels visent dans la plupart des cas des décisions rendues par les cours d'appel provinciales et territoriales, la Cour d’appel fédérale et la Cour d’appel de la cour martiale du Canada.
L’audience devant la Cour suprême n’est pas un procès, et il n’y a pas de jury. Personne ne témoigne devant la Cour ou n’y présente des éléments de preuve. Les juges entendent des plaidoiries relatives à d’importants points de droit et questionnent les avocats et les avocates qui les présentent. Les juges entendent uniquement les causes qui, à leur avis, sont d’importance nationale, à l’exception des affaires criminelles qui sont automatiquement portées devant la Cour lorsque les juges de la cour d’appel ne s’entendaient pas sur une question de droit.
Il arrive parfois que les gouvernements fédéral, provinciaux ou territoriaux demandent l’avis de la Cour suprême relativement à une loi existante ou à un projet de loi. Ces demandes sont appelées des renvois et ont habituellement pour but de déterminer si une mesure législative est constitutionnelle. Au cours du printemps 2021, la Cour suprême a rendu un arrêt concernant plusieurs renvois provinciaux qui sollicitaient son avis sur la constitutionnalité de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Apprenez-en davantage au sujet de ce jugement historique.
La Cour suprême du Canada est également active sur la scène mondiale en tant que membre respectée d’organisations judiciaires internationales, telles la Conférence mondiale sur la justice constitutionnelle, l’Association des cours constitutionnelles francophones et l’Association internationale des hautes juridictions administratives.
Juges
Juge en chef Richard Wagner
Nommé du Québec en 2012
Nommé juge en chef en 2017
Juge Michael J. Moldaver
Nommé de l'Ontario en 2011
Juge Andromache Karakatsanis
Nommée de l'Ontario en 2011
Juge Suzanne Côté
Nommée du Québec en 2014
Juge Russell Brown
Nommé de l'Alberta en 2015
Juge Malcolm Rowe
Nommé de Terre-Neuve-et-Labrador en 2016
Juge Sheilah L. Martin
Nommée de l'Alberta en 2017
Juge Nicholas Kasirer
Nommé du Québec en 2019
Juge Mahmud Jamal
Nommé de l'Ontario en 2021
Période de transition à la Cour
Le 1er juillet dernier, le juge Mahmud Jamal a été officiellement nommé à la Cour suprême du Canada. Le plus nouveau membre de la Cour a été assermenté le jour même où la juge Rosalie Silberman Abella a atteint l’âge de la retraite obligatoire, 75 ans, après avoir siégé pendant 17 années au sein du plus haut tribunal du pays.
Lors de la cérémonie d’accueil officielle du juge Jamal en octobre, des invités spéciaux ont souligné sa collégialité, son intelligence et son affabilité. Ils ont également salué sa nomination en ce qu’il est le premier juge racialisé à siéger à la Cour suprême du Canada.
Nouveaux emblèmes héraldiques dignes d’intérêt
Le 15 mars 2021 était une journée ensoleillée et venteuse — des conditions idéales pour le déploiement d’un des nouveaux emblèmes héraldiques de la Cour suprême du Canada. Le juge en chef Richard Wagner a eu l’honneur d’être le premier à hisser le drapeau de couleur rouge vif, blanche et dorée. Même si les photographes n’étaient pas en mesure de le constater, le juge en chef était tout sourire sous son masque durant la cérémonie.
Quelques minutes plus tôt, à l’intérieur de la salle d’audience, lors de la cérémonie diffusée en direct pour le public, le héraut d’armes du Canada, M. Samy Khalid, avait officiellement proclamé les lettres patentes concédant un drapeau ainsi qu’un insigne, emblème similaire à des armoiries. Riches de symbolisme, ces emblèmes héraldiques témoignent du rôle et des traditions de la Cour, ainsi que de l’indépendance judiciaire, principe fondamental visant à assurer le respect de la primauté du droit et des valeurs démocratiques du pays.
Comme l’a expliqué le héraut d’armes, M. Khalid, l’insigne conçu par sa prédécesseure, Mme Claire Boudreau, raconte l’histoire de la Cour, « son passé, son présent et son avenir avec éloquence et élégance ». Figure également sur l'insigne la devise choisie par la Cour, « Justitia et Veritas » (justice et vérité), les noms des deux statues allégoriques qui montent la garde à l’extérieur de l’édifice.
Jusqu’en 2021, les armoiries du Canada, dont se servent également les branches exécutive et législative du gouvernement, étaient reproduites sur les décisions de la Cour.
« Ces nouveaux emblèmes expriment les valeurs de notre institution, soit la justice, l’indépendance, l’intégrité, la transparence et le bilinguisme », a déclaré le juge en chef. Chaque fois que la Cour siège, le drapeau est hissé sur le mât qui se trouve devant l’édifice, à l’est, du côté du Parlement. Le premier jugement sur lequel a figuré le nouvel insigne fut le renvoi sur la constitutionnalité de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre.
Explication du symbolisme
Bandes verticales
Les bandes verticales rouges, évoquant des chemins parallèles et un mouvement ininterrompu, indiquent que la Cour est chargée d’appliquer le droit dans les deux traditions juridiques du pays – la common law et le droit civil – et qu’elle est une institution bilingue, travaillant tant en français qu’en anglais. Ces bandes symbolisent aussi les contributions des Autochtones à la société canadienne et au droit du pays, en ce qu’elles rappellent les principes de paix et de respect mutuel communiqués par le wampum à deux rangs.
Les neuf juges de la Cour
Le grand losange et sa mosaïque représentent la Cour, les neuf juges et le rôle central qu’ils jouent en tant que juridiction d’appel de dernier ressort du pays, garante de la Constitution et des droits et libertés de tous les Canadiens et Canadiennes. Le fond blanc incarne l’idéal de transparence et d’accessibilité de l’appareil judiciaire. Le rouge et le blanc sont emblématiques du Canada, tandis que l’or symbolise l’excellence.
Couronne royale
Les emblèmes héraldiques sont surmontés d’une version stylisée de la couronne de saint Édouard, coiffure d’apparat utilisée lors du couronnement des monarques du Canada. Cette couronne est un symbole du statut du Canada en tant que monarchie constitutionnelle ayant à sa tête un roi ou une reine souveraine.
Lauriers
La forme ronde représente l’harmonie et la collégialité, et les lauriers, le symbole judiciaire par excellence. Les lauriers sont dérivés de l’insigne de la Cour suprême, conçu il y a près de cent ans par l’éminent architecte montréalais Ernest Cormier.
Devise
Les mots latins « Justitia et Veritas » signifient « Justice et Vérité ». Ce sont aussi les noms des deux statues, allégories de la Justice et de la Vérité, qui montent la garde devant la Cour suprême.
Un devoir constitutionnel
L’administrateur du gouvernement du Canada
Le 23 janvier 2021, le juge en chef du Canada a été appelé à s’acquitter d’un devoir constitutionnel unique. En l’absence d’un gouverneur général, le très honorable Richard Wagner a été assermenté à titre d’administrateur du gouvernement du Canada. Conformément aux Lettres patentes constituant la charge de Gouverneur général du Canada de 1947, l’administrateur est investi de l’ensemble des pouvoirs et attributions du gouverneur général.
« M’acquitter de ce devoir constitutionnel unique s’est avéré une leçon d’humilité » a déclaré le juge en chef. « Je chérirai pour toujours le souvenir d’avoir pu reconnaître officiellement les talents, l’expertise, la bravoure et les sacrifices d’un si grand nombre de Canadiens et de Canadiennes distingués et dévoués. »
Pendant une période de six mois, dans son rôle d’administrateur du gouvernement, le juge en chef a accordé la sanction royale à 12 lois du Parlement, a signé 557 décrets, a accueilli des ambassadeurs et des hauts-commissaires au Canada, a fait deux proclamations nationales et a présidé à de nombreuses investitures et présentations de distinctions honorifiques. Lors de cérémonies virtuelles, il a rendu hommage à des récipiendaires de l’Ordre du Canada, de décorations pour actes de bravoure, de décorations pour service méritoire et de la médaille du souverain pour les bénévoles. De plus, il a signé 1 093 commissions d’officiers et parchemins de commission des Forces armées canadiennes.
Le juge en chef Richard Wagner a cessé d’agir à titre d’administrateur lorsqu’il a procédé à l’assermentation de la gouverneure générale du Canada, Mary Simon, le 26 juillet 2021.
Décisions
Décisions notables par ordre chronologique ascendant
R. c. T.J.M.
La Cour suprême conclut que tant une cour provinciale qu’une cour supérieure a le pouvoir d’entendre et de trancher une demande de mise en liberté sous caution présentée par un adolescent accusé en vertu du Code criminel.
R. c. R.V.
La Cour suprême fournit aux cours d’appel des précisions sur les verdicts incompatibles rendus par un jury.
Renvois relatifs à la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre
La Cour suprême juge que la loi sur la tarification du carbone est constitutionnelle.
R. c. Desautel
Des non-citoyens et non-résidents peuvent revendiquer un droit ancestral en vertu de la Constitution, juge la Cour suprême.
Colucci c. Colucci
La Cour suprême rejette la demande d’un parent qui voulait faire réduire ou annuler une dette de 170 000 $ en pensions alimentaires pour enfants impayées.
Sherman (Succession) c. Donovan
La Cour suprême juge que les ordonnances de mise sous scellés des dossiers de succession d’un couple torontois étaient injustifiées.
R. c. Chouhan
Des modifications apportées au processus de sélection des jurés prévu par le Code criminel sont constitutionnelles, juge la Cour suprême.
Canada c. Canada North Group Inc.
La Cour suprême juge que Canada North Group peut payer les dépenses nécessaires à sa restructuration avant de verser à l’Agence du revenu du Canada les sommes qu’elle lui doit.
Université York c. Canadian Copyright Licensing Agency (Access Copyright)
La Cour suprême juge qu’un tarif de droit d’auteur n’était pas opposable à l’Université York.
Toronto (Cité) c. Ontario (Procureur général)
La Cour suprême juge constitutionnelle une loi ontarienne qui a réduit le nombre de conseillers de la ville de Toronto durant les élections municipales de 2018.
Ward c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse
La Cour suprême conclut que le Tribunal des droits de la personne du Québec n’avait pas compétence pour entendre une cause concernant un humoriste qui s’est moqué d’un jeune chanteur adolescent bien connu ayant un handicap, parce qu’il ne s’agissait pas de discrimination visée par la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. La Cour explique également le cadre juridique applicable à un recours en discrimination mettant en cause le droit à la dignité d’une personnalité publique et la liberté d’expression d’un humoriste professionnel.
R. c. Albashir
La question en litige dans cette affaire consistait à décider comment les tribunaux doivent traiter les crimes qui sont commis après que la Cour suprême a déclaré une disposition législative inconstitutionnelle, mais avant que cette déclaration ne prenne effet.
Ensemble des décisions
= Voir la section Décisions notables.
*Cette décision tranche plus d’une affaire.
**Motifs à suivre en 2022.
Un jugement historique
Le 25 mars, la Cour suprême du Canada a tranché un débat national concernant la constitutionnalité d’une loi fédérale visant à lutter contre les changements climatiques. À 9 h 45, à Ottawa, la plus haute instance du Canada a conclu à la constitutionnalité de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Les juges majoritaires ont écrit que les changements climatiques sont causés par les émissions de gaz à effet de serre résultant des activités humaines, et que celles-ci posent un risque grave pour le futur de l’humanité.
Le Parlement a adopté la loi en 2018 afin d’aider le Canada à respecter l’engagement qu’il a pris à l’échelle internationale, au titre de l’Accord de Paris, de réduire les émissions de gaz à effet de serre de plus de 30 % sous les niveaux de 2005, d’ici 2030. La loi exigeait que les provinces et les territoires mettent en œuvre des systèmes de tarification des gaz à effet de serre avant le 1er janvier 2019, ou adoptent celui imposé par le gouvernement fédéral.
La Saskatchewan, l’Ontario et l’Alberta ont contesté la constitutionnalité de la loi. Ces provinces faisaient valoir que leurs propres politiques provinciales auraient pour effet de réduire les émissions. Elles ont aussi affirmé que, suivant la Constitution, elles ont compétence exclusive sur leurs ressources naturelles.
Le gouvernement fédéral a affirmé qu’il a le pouvoir de s’attaquer aux questions nationales comme les changements climatiques. Il a aussi maintenu que la loi est un filet de sécurité visant à faire en sorte qu’il y ait des normes minimales en matière de tarification du carbone à l’échelle du Canada. Il a indiqué qu’il n’interviendrait qu’auprès des provinces et territoires n’ayant aucune politique adéquate.
Dans leur décision, les juges majoritaires ont statué que les changements climatiques causent des dommages au-delà des frontières des provinces. Ils ont qualifié les changements climatiques de matière d’intérêt national relevant du pouvoir du Parlement de faire des lois pour la « paix, l’ordre et le bon gouvernement », prévu dans la Constitution. Les six juges ont reconnu que le fédéralisme, et l’équilibre des pouvoirs nationaux et provinciaux qui l’accompagne, est un principe fondateur de la Constitution. Ils ont toutefois souligné que la loi ne s’appliquerait qu’aux provinces et territoires n’ayant pas de système effectif de tarification des émissions de gaz à effet de serre.
Bien que de nombreux Canadiens et Canadiennes qualifient le système de tarification de « taxe sur le carbone », les juges ont expliqué qu’il ne s’agit pas d’une taxe mais d’un prélèvement de nature réglementaire, parce que son objectif précis est de changer le comportement des gens et de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Auxiliaires juridiques de la Cour suprême
Quand les juges de la Cour suprême sont appelés à trancher des questions de droit importantes, en plus de collaborer les uns avec les autres, ils peuvent compter sur l’appui de leurs auxiliaires juridiques. Ces personnes nouvellement diplômées des différentes facultés de droit du pays apportent au plus haut tribunal du Canada une diversité d’idées, de connaissances et de vécus.
Pour sa part, le juge en chef Richard Wagner dit rechercher des auxiliaires à l’esprit curieux : « Je m’attends à ce que la personne en question soit curieuse, prête à développer des théories et à étudier des nouveaux concepts ». Un tel stage, a-t-il ajouté, « est un engagement sérieux », qui non seulement permet aux auxiliaires d’acquérir « beaucoup d’expérience et de connaissances », mais permet également à la Cour et aux juges de profiter de l’appui de ces derniers, notamment dans le processus de rédaction de leurs motifs de jugement.
Avant l’audition d’un appel, les auxiliaires effectuent des recherches et fournissent à leur juge respectif un résumé de l’affaire ainsi qu’un avis juridique. Après avoir assisté à l’audience, les auxiliaires collaborent étroitement avec les juges lors de la rédaction des motifs de jugement. Ce travail s’effectue dans un environnement dynamique, où la collégialité revêt une grande importance.
Les personnes qui agissent comme auxiliaires doivent « être prêtes à travailler avec assurance au sein d’une équipe dans laquelle les gens auront de vrais débats sur des questions d’importance », affirme la juge Sheilah Martin, l’actuelle présidente du Comité des auxiliaires juridiques. Elle précise que les auxiliaires « aident les juges à délibérer et à rendre de bons jugements ». Individuellement, dit‑elle, ils « font partie d’une équipe au sein d’un cabinet » et, ensemble, « ils font partie d’une équipe » au sein de la Cour, chaque cabinet ayant sa propre équipe d’auxiliaires.
Le fait de se retrouver au cœur du processus décisionnel judiciaire de la Cour suprême constitue pour les auxiliaires une expérience inestimable. En effet, en plus d’apprendre, par exemple, comment rédiger des arguments écrits et oraux plus convaincants, les auxiliaires se rencontrent souvent socialement en dehors du travail, nouant ainsi des amitiés et des liens professionnels qui durent toute leur vie.
Le juge en chef Wagner souligne que les auxiliaires juridiques tendent à se réunir à quelques années d’intervalle. Les auxiliaires forment, dit-il, « une communauté tissée serrée », dont les membres « gardent des liens pour toujours, peu importe ce qu’ils font dans l’avenir, peu importe le pays dans lequel ils vont travailler ».